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Colloque international « Traces et approches des usages dans la culture populaire et médiatique (1880-2020) »
29 mai 2024 - 30 mai 2024
Comment les publics de la culture populaire participent-ils à créer le sens des productions culturelles qu’ils affectionnent ? Que nous disent leurs enthousiasmes, leurs plaisir coupables, leurs lectures buissonnières du rôle que joue la culture dans leur vie personnelle autant que dans l’ensemble de la sphère sociale ? Une trentaine de spécialistes présenteront les résultats de travaux en cours portant sur différentes pratiques culturelles passées et actuelles, qu’il s’agisse de périodiques féminins, de la chanson, de romans de Bob Morane ou du tatouage, afin de nous permettre de mieux cerner ce que peuvent nous apprendre les usages de la culture.
MERCREDI 29 MAI 2024
UQAM – Salle des Boiseries (J-2805) et en ligne
8h45
Accueil
8h55
Mot d'ouverture
Séance 1 « Sources et archives inédites »
Présidence : Will Straw (Université McGill)
9h
Loïc Artiaga (Université de Limoges)
« Surveiller et lire. Usages policiers de fragments médiatiques »
9h30
Sandria P. Bouliane (Université Laval)
« Les cahiers de Lolyta : Traces et pratiques de la collection de chansons populaires »
10h
Sébastien Fevry (UC Louvain)
« Le film fixe dans la France des Trente Glorieuses. Un support oublié, des usages à reconsidérer ? »
10h30
Pause
Séance 1 « Sources et archives inédites » (suite)
Présidence : Anouk Bélanger (UQAM)
10h45
Cécile Prévost-Thomas (Université Sorbonne Nouvelle)
« Quand l’espace numérique convoque la mémoire culturelle : l’exemple des traces et des usages du livre d’or dans la chanson »
11h15
Laurence Vallières (Université Laval)
« S’imprégner de la matière, saisir la vie quotidienne : les wardrobes studies comme méthode d’étude des pratiques d’habillement »
11h45
Repas du midi
MEM – Centre des mémoires montréalaises (Cabaret)
13h15
Accueil
13h25
Mot de bienvenue de Catherine Charlebois (MEM)
Séance 2 « Prises de parole, interventions, agentivité »
Présidence : Jean-Michel Berthiaume (UQAM)
14h
Julien Schuh (Université Paris Nanterre)
« “Je me permets de vous écrire” : usages de la littérature populaire dans la correspondance de ses lecteurs »
13h30
Adrien Rannaud (Université de Toronto)
« La presse de célébrités comme usage de la culture populaire : journaux, publics et vie culturelle au Québec (1945-1965) »
14h30
Mélodie Simard-Houde (UQTR)
« Une presse faite par ses lectrices : voix et visages dans Intimité et Confidences»
15h
Pause
Séance 3 « Les usages dans la vie privée et intime »
Présidence : Gabrielle Tremblay (UQAM)
15h15
Benoit Crucifix (KU Leuven/KBR)
« Le scrapbook de bandes dessinées : usages communs et pratiques minoritaires du découpage »
15h45
Megan Bédard (UQAM)
« Un récit gravé sur la peau. Étude autoethnographique du tatouage populaire »
16h15
Pause
Séance 3 « Les usages dans la vie privée et intime » (suite)
Présidence : Matthieu Letourneux (Université Paris Nanterre)
16h30
Marie Goehner-David (Université de Strasbourg)
« L’album photographique à l’épreuve du temps. Mutation des pratiques de narrations visuelles familiales »
17h
Bénédicte Taillefait (Université Laval)
« Pratiques routinières de l’intime : le cas de la lecture de romances érotiques comme lieu de négociations de l’agentivité des lectrices »
17h30
Vin d'honneur et visite du MEM – Centre des mémoires montréalaises
JEUDI 30 MAI 2024
UQAM – Salle des Boiseries (J-2805) et en ligne
8h45
Accueil
Séance 4 « Usages ordinaires »
Présidence : Yoan Vérilhac (Université de Nîmes)
9h
Sylvain Lesage (Université de Lille)
« Lectures ordinaires de Bob Morane »
9h30
Aurélie Huz (Université Paris Nanterre)
« Aimer la science-fiction: traces domestiques des usages ordinaires du genre »
10h
Matthieu Letourneux (Université Paris Nanterre)
« Marges et réécritures : perspectives théoriques »
10h30
Pause
Séance 5a « Communautés »
Présidence : Sandria P. Bouliane (Université Laval)
10h45
Francis Lapointe (UQAM)
« Le Grand jubilé musical de Montréal, point d’orgue du banding au Québec ? »
11h15
Jacques Migozzi (Université de Limoges) et Michel Poupin (Université de Limoges)
« Le théâtre amateur vendéen de l’Entre-deux-guerres aux années 1970 : traces et usages d’un phénomène aussi massif qu’ignoré »
11h45
Bernard Jeannot-Guérin (Université de Lorraine)
« Collecter les archives du spectacle musical contemporain : l’exemple des pratiques amateures de comédies musicales en France »
UQAM – DS-M465
Séance 5b « Communautés »
Présidence : Marie-Pier Luneau (Université de Sherbrooke)
10h45
Christine Faucher (UQAM)
« Regard détaillé sur les pratiques culturelles informelles d’élèves du secondaire durant la dernière décennie »
11h15
Pierre Barrette (UQAM)
« Ce que fait la téléréalité au scénario amoureux. Une analyse de la réception de Si on s’aimait à travers les traces numériques »
11h45
Guillaume Guenat (Université de Lausanne)
« L’Histoire orale des réceptions ordinaires du jeu vidéo au niveau local (1970-2000) - Enjeux méthodologiques et retours d’expérience »
UQAM – Salle des Boiseries (J-2805) et en ligne
12h15
Repas du midi
Séance 6 « Les usages au prisme des médias »
Présidence : Stéfany Boisvert (UQAM)
14h
Guillaume Pinson (Université Laval)
« Interpréter le journal : traces et usages de partitions musicales dans la presse de la fin du XIXe siècle »
13h30
Chantal Savoie (UQAM) et Clothilde Cazamajor (UQAM)
« Les femmes qui “veulent entrer au cinéma” à Montréal dans les années 1920 »
14h30
Marie-Pier Luneau (Université de Sherbrooke) et Jean-Philippe Warren (Université Concordia)
« Police Journal, une version “true crime” d’Arsène Lupin »
15h
Pause
Séance 6 « Les usages au prisme des médias » (suite)
Présidence : Anthony Glinoer (Université de Sherbrooke)
15h15
Rachel Nadon (Université de Sherbrooke, Université Paris Nanterre, Université McGill)
« Émotions et archives de sentiments : “reconstituer” les archives d’Allô police »
16h15
Anaïs Goudmand (Sorbonne Université)
« Traces socionumériques de l’expérience des séries télévisées : la pratique du live-tweet »
15h45
Yoan Vérilhac (Université de Nîmes) et Claire Cornillon (Université de Nîmes)
« Attends, j’appelle Séries Mag! Pratiques de réception des séries des années 1990 au début des années 2000 »
16h45
Mot de clôture

Crédit photo : Feature. Bingo Game, 4555 N.D.G. Avenue, Fonds Conrad Poirier, Bibliothèque et Archives nationales du Québec
Argumentaire
Depuis près d’une centaine d’années, une succession d’ébranlements disciplinaires et de « grands tournants » épistémologiques ont favorisé la production de travaux portant sur les cultures populaires et médiatiques. Alors que ces corpus ont d’abord été étudiés du point de vue de leur altérité par rapport à la culture légitime, leur considération a progressivement induit un renouvellement des cadrages et méthodes visant à en rendre compte, afin d’en venir à les appréhender à partir de leurs manières propres de signifier.
Parmi les chantiers ouverts dans la foulée de ces transformations, les travaux portant sur les usages de la culture ont constitué un filon fertile. On en trouve déjà la trace chez Richard Hoggart durant la deuxième moitié des années 1950 ; mais les années 1980, avec les contributions phares de Michel De Certeau (L’invention du quotidien), Janice Radway (Reading the Romance), Anne-Marie Thiesse (Le Roman du quotidien), John Fiske (Reading the Popular), voire, dans une certaine mesure, celles de Pierre Bourdieu (La distinction) et de Stanley Fish (Is there a text in this class ?), ont contribué à orienter l’examen de la culture de grande consommation du côté des études de réception. Si le courant des fan studies est devenu, à partir des années 1990 mais surtout dans les années 2000, avec l’omniprésence d’Internet, le vecteur le plus visible de cette attention portée aux usages et à la productivité des gestes culturels posés par les fans (avec les travaux d’un Matt Hills ou d’un Henry Jenkins), il a peut-être occulté les autres pratiques de consommation, plus quotidiennes, plus banales. C’est à ces autres pratiques que ce colloque souhaite s’intéresser.
En effet, alors que les activités des fans semblent incarner la quintessence des usages de la culture populaire, d’autres pratiques, plus discrètes, recèlent un potentiel aussi vaste que peu étudié. Les lectures courantes, liées aux circonstances, celles, autrefois dissimulées, des productions délégitimées, celles, buissonnières, qui circulent dans les cours de récréation, ou transmises au contraire entre les générations, celles, jetables, liées aux circonstances de vacances ou de loisirs, celles, régulières, qui s’enracinent dans des habitudes, forment un ensemble de pratiques d’autant plus difficiles d’accès qu’elles ne sont guère médiatisées. Pourtant, elles n’en apparaissent pas moins comme des documents essentiels pour accéder à ce que Gramsci appelait « l’humus de la culture populaire », pratiques collectives, qui se réinventent parfois à partir d’usages anciens, et qui façonnent nos imaginaires et nos rapports à la culture, mais également ceux des classes dominées. Retrouver les pratiques passées – celles, aux XIXe et XXe siècles, des lectrices, des plus jeunes, des classes populaires, ou des populations et communautés marginalisées – apparaît comme un enjeu capital pour échapper à l’illusion d’une singularité de l’époque contemporaine. Or, parce que ces usages sont banals, ils sont difficiles à documenter, et imposent d’inventer de nouvelles approches et méthodes, afin de tenter de les comprendre et d’en intégrer l’impact dans une histoire culturelle plus inclusive.
C’est d’autant plus nécessaire quand, s’éloignant de l’époque contemporaine, on se penche sur des pratiques passées – pas forcément anciennes d’ailleurs, tant dans ce domaine, la disparition d’un support peut entraîner en quelques décennies l’oubli des usages. Or, si l’on connaît aujourd’hui – pour ne prendre que quelques exemples – le rôle qu’ont joué sur les transformations des mœurs, en affectant les pratiques quotidiennes, individuelles et collectives, la presse au XIXe siècle, le cinéma dans le premier XXe siècle, le transistor et le disque vinyle dans les années 1960, ou le développement de la VHS dans les années 1980, on sous-estime le rôle d’autres supports de diffusion dans les sensibilités individuelles et collectives. Dès lors, l’accès aux pratiques est aussi un enjeu capital pour relire l’histoire de la culture populaire. Comprendre comment les objets de la culture de masse étaient utilisés, quelle signification ils prenaient dans les usages privés ou dans les échanges entre pairs, comment ils étaient investis collectivement ou individuellement, revient à questionner la manière dont ils faisaient effectivement culture, c’est-à-dire la façon dont ils prenaient sens.